Les doigts d’argent (Sic)
Edouard aux doigts d’argent, c’est mon coiffeur. Ne le cherchez pas à midi à quatorze heure, vous ne le trouverez pas.
Pourtant, c’est un doux travailleur. C’est un homme raffiné jusqu’au bout des ongles.
Rien n’est laissé au hasard, à part peut-être, son big bazar caché au fond des tiroirs.
Il met les cheveux en quatre, même les plus tenaces, les ébouriffés, les ondulés, les frisés.
Ah ! Il en défrise plus d’un, même les plus chauves, sans être chauvin.
A la vitesse mécanique, presque en tout automatique, il ratiboise, coupe dans le tas, passe la tête au carré, découpe suivant les pointillés, tire des lignes, les alignent, se trouve à la corde pour aller plus vite le long des belles courbes, bouche encore les coins encore et encore, ça mastique, ça astique, passe à la coupe classique, pour être plus classe, puis remet le tout, bien à plat et…à la fin, il est tout essoufflé, Ouf !
Encore un dernier souffle et il en remet une couche, une boule à zéro, son dernier coup de ciseau, tout en finition, c’est un artiste complet.
De l’art sur mesure, dans la démesure parfois. Il réalise des merveilles, souvent des pièces uniques, et toujours pour son propre compte. C’est un vendeur de charme, le coquin.
La sculpture c’est sa tasse de thé, les architectures son marc de café.
Son salon, Oh ! Un conte de fée. Des histoires à raconter, entre des miroirs et des miroirs à ne plus en voir, à ne plus se revoir.
Oh mon beau miroir, Dis moi qui est …..On imagine le tableau, surtout la suite.
Tout se réfléchit, tout se dit. Rien n’est dit au hasard.
Des fois, c’est rasant, plus que poilant.
La spécialité de la maison, c’est la coupe Apollon pour les messieurs, c’est le top celui du trop divin. Un peu cher, entre-nous, on est pas Crésus qui veut ! La note finale et royale est servie dans un étui, comme de la poudre aux yeux. Tout est merveilleux, c’est le secret de ce Prince Edouard. Il est tellement sophistiqué, qu’on sent la vie de château. Gling gling ça sonne le bling-bling.
Mais la beauté n’a pas de prix, surtout chez les dames. Ce sont elles les vraies permanentes du salon.
Elles alignent les heures comme elles rallongent les billets doux.
La femme a elle aussi sa coupe royale.
La coupe Vénus. On est dans le jardin des délices. On sent l’amour félin, le désir de plaire, et surtout rugir comme un fauve à la sortie du magasin.
Sic Luceat
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