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Autour des mots
5 novembre 2007

Embullée ! (Mathu)

La pénitence était bien sévère. Certes, elle n’aurait jamais dû sortir dans la noosphère sans son scaphandre, mais comment aurait-elle pu mener à bien son étude d'anthropologie ainsi harnachée ? Les gobeurs de palindromes étaient devenus de plus en plus méfiants et ne se laissaient plus aussi facilement fixer,  tels des papillons légers et colorés condamnés à l’épingle par des collectionneurs  insensibles. Elle avait donc décidé de s’aventurer sans protection dans leur sphère, espérant bien collecter à leur insu quelques bons mots dont ils avaient le secret pour remplacer la blague Carabar, espérant ainsi étendre la clientèle du bâton casse bridge aux intellos.

Image1Le Carabar devait devenir la friandise de tous, elle s’en était fait la promesse.  La friandise consomptible serait accompagnée d’un baume spécialement étudié pour réparer les dégats causés sur les mâchoires trop fragiles. La vente du Carabar allait lancer la vente du Magic Racines. Vos dents tombent ? Magic Racine les régénère. Une dose de Magic Racine est offerte pour l’achat d’un paquet de Carabar, essayez-le et retrouvez vos plaisirs d’enfants. ça vous a une autre gueule que la réclame pour Fixodent, pas vrai ?

Pour réussir en publicité, il fallait faire preuve d’empathie, elle en avait toujours été persuadée. Ou faire semblant. L’amour du prochain, voilà qui faisait vendre. L’Homo sapiens se complaisait dans la fainéantise, la gourmandise, voire pire, il suffisait de l’y encourager en lui laissant croire que c’était pour son bien. Mieux, pour le bien de l’humanité toute entière. Et on pouvait vendre à peu près n’importe quoi. Carabar et Magic Racine allaient faire le bonheur de l’humanité.

En attendant son heure de gloire, elle se trouvait en bien mauvaise posture, engluée dans une bulle géante de mâle à barre. Beurk. Elle regrettait amèrement l’élan d’irénisme qui l’avait menée là. Jamais elle n’aurait dû accepter de laisser proliférer cette dangereuse gomme à mâcher pour pouvoir placer son Carabar tranquille. Hélas, sa vanité l’avait poussée à croire qu’elle saurait toujours éviter de se faire embuller en rose. Elle pensa au vingtième siècle et à son entarteur débonnaire. La crème chantilly était vite nettoyée, quant à se libérer de la bulle adhésive, c’était une autre histoire. Surtout quand la gomme avait été préalablement mâchée par un authentique yéti, sombre et taciturne. Si au moins elle réussissait à déboucher sa corne à télépathie, elle pourrait appeler à l’aide, les secours viendraient la sauver d’une asphyxie inexorable. Mais ce jour là, elle avait décidé de laisser son corps au repos, son esprit serait bien incapable d'extraire la matière collante pour faire résonner le SOS du vingt-huitième siècle : “Racheumeuneu”

Mathu

La consigne ==> ICI

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Commentaires
C
Je me suis régalée à la lecture de ton texte et ce n'est pas peu dire. Belle imagination et super clin d'oeil à nos chers bonbons "collôdent". Merci pour ce bon moment. J'en ai encore le sourire aux lèvres...
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